Ressource — La coopération entre élèves
Les techniques coopératives scolaires sont fortement inspirées de la pédagogie de Freinet et du mouvement de l’École moderne. Elles proposent des techniques éducatives respectant les invariants pédagogiques. Ces techniques visent à développer chez les apprenant·es le plaisir d’apprendre ensemble, d’accroitre leurs compétences psycho-sociales (notamment l’entraide, l’ouverture d’esprit, l’esprit d’initiative, l’engagement, la responsabilisation…) et de devenir acteur de ses apprentissages.
En sorte, la pédagogie coopérative insiste sur l’auto-socio-construction des savoirs (notion traitée précédemment).
S’il faut résumer les techniques coopératives, voici des mots-clés qui en donnent une vision certes parcellaire mais pertinente : autonomie, collaboration, coopération, conflit socio-cognitif, responsabilisation, aide ~ entraide ~ tutorat, travail de/en groupe, gestion des conflits, blog de classe, règles de classe, individualisation des apprentissages, réciprocité, solidarité, générosité, bienveillance…
Dans les pratiques coopératives, les apprenant·es sont régulièrement amené·es à interagir les un·es avec les autres, dans plusieurs situations :
La coopération peut aussi être décrite par cinq champs de préoccupation :
- apprendre à coopérer
- faire valoir les droits de l’enfant
- permettre l’expression libre
- encourager le tâtonnement
- développer la responsabilisation, l’autonomie et l’émancipation des enfants
Apprendre aux élèves à coopérer ne va pas de soi et s’apprend : c’est pour cela que des temps de formation (des élèves et des enseignant·es) sont nécessaires. Par exemple, les ressources utilisées pour bâtir ce cours reposent sur celles de l’association ICEM34 (Institut coopératif de l’école moderne de l’Hérault ; consulter leur site en ligne), qui comprend des formateurs et formatrices, dont ceux qui m’ont formé (Pierre Cieutat, Sylvain Connac).
Ce courant pédagogique ne se donne pas comme objectif d’apprendre à coopérer. Son principal objectif reste bien les apprentissages, mais il conçoit la coopération comme un levier important pour les favoriser. En sorte, on n’apprend pas à coopérer : on apprend en coopérant.
Exemples de mise en œuvre dans mes classes de 6e
Plusieurs activités et techniques permettent l’expression de la coopération
- Le conseil d’élèves : une fois par quinzaine actuellement (contre une heure par semaine précédemment en raison d’une baisse des heures consacrées à la coopération dans mon établissement scolaire), dans un cadre formalisé (notamment en ce qui concerne la prise de parole) et confidentiel (ce qui se dit au conseil d’élèves ne doit pas quitter le conseil d’élèves, sauf en cas de décision dans ce sens), les élèves eux-mêmes (avec un·e président·e, un·e secrétaire et un responsable des gêneurs, qui peut exclure du conseil les élèves disruptifs) dirigent un conseil comprenant plusieurs temps :
- la météo émotionnelle de la semaine (comment je me sens et pourquoi)
- les problèmes à régler et les solutions proposées par le conseil
- les remerciements et les félicitations que l’on souhaite dire devant les autres
- Le Quoi de neuf ? : une fois par semaine, un·e élève qui s’est inscrit sur un tableau affiché dans la salle de classe présente à ses camarades un exposé bref (cinq minutes suivies d’un temps d’échange) sur un sujet de son choix (activité personnelle, lecture, série… la liste est ouverte) dans un cadre sécurisant où le reste de la classe doit se montrer à l’écoute et bienveillant
- Le code couleurs : dans la salle de classe, une affiche en couleurs indique trois modalités de prise de parole. Code rouge : on ne doit pas parler mais écouter l’enseignant. Code orange : on a le droit de chuchoter pour travailler en groupes. Code blanc : on peut parler si l’on demande la parole
- Les ateliers de grammaire : des activités nouvelles en grammaire, propres à générer des conflits socio-cognitifs, doivent être effectuées en groupes (dans le cadre de l’entraide) et ne peuvent être résolues que par l’expérimentation et le tâtonnement. Voir l’exemple donné dans la ressource suivante (Exemple d’atelier de grammaire)
- Les discussions à visée philosophique : régulièrement, les élèves sont assemblés en cercle et discutent entre eux d’un sujet philosophique ou propre à faire naitre des débats (« Peut-on parler de religions en classe ? », « Comment être sûr qu’on peut croire quelque chose ? », « Les monstres existent-ils »…) dans un système très formalisé :
- un·e président·e qui donne la parole
- un·e reformulateur/reformulatrice qui doit, après chaque intervention, redire avec ses propres mots ce qui vient d’être ajouté
- un·e secrétaire qui note les principales idées exprimées
- un·e journaliste qui note comment le débat se déroule (points de blocages, moments plus animés, évolution de la discussion…)
- Le plan de travail : pendant un temps déterminé, les élèves choisissent un certain nombre d’exercices qui leur sont proposés et se font évaluer en temps réel : je leur indique s’il y a des erreurs ou non et, si nécessaire, où elles sont. Leur objectif est de valider au moins un exercice par catégorie, en commençant toujours par le plus simple (à une étoile). Ils devront rendre leur travail définitif à la fin du temps accordé au plan de travail. Ce travail sera de nouveau évalué. Pendant les séances en plan de travail, les élèves sont en autonomie et peuvent mettre à profit ce temps pour travailler en entraide ou en tutorat. Voir l’exemple donné dans les ressources de cette section (Exemple de plan de travail en autonomie)
Les temps de travail coopératif sont importants. Le tutorat est mis en place dans le respect du protocole suivant (toujours affiché dans la salle) :
Règles de prise de parole
Trois règles non négociables sont imposées dans mes classes, favorisant la coopération et les valeurs qui animent mes cours :
- on a le droit de se taire
- on n’a pas le droit de couper la parole
- on n’a pas le droit de se moquer
Je m’applique bien entendu à respecter ces règles avec mes élèves (et avec mes collègues).
Dans la majorité des temps d’échange formalisés (Quoi de neuf ?, conseil d’élèves, discussions à visées philosophiques), les élèves qui souhaitent prendre la parole lèvent la main et leur nom est inscrit au tableau (par moi-même ou un·e responsable des prises de parole). Pour faire respecter la règle : « on n’a pas le droit de couper la parole », des gestes de communication non verbale sont instaurés, permettant de s’exprimer sans parler :
- pour dire qu’on est d’accord, qu’on félicite
- pour dire qu’on n’est pas d’accord mais qu’on ne souhaite pas prendre la parole
- pour dire qu’on n’est pas d’accord et qu’on souhaite prendre la parole en priorité
- pour dire que ce qui est exprimé a déjà été dit ou est trop long
- pour demander de parler plus fort
- pour demander de faire moins de bruit, de parler moins fort